Vous avez vocation à aider les autres ? Se rendre utile est important pour vous ? Vous avez probablement un profil adéquat pour vous tourner vers l’humanitaire. Cependant, il ne suffit pas d’envoyer un panier repas chaque semaine. Le monde de l’humanitaire nécessite un réel investissement, de la sincérité et beaucoup d’humilité. Thibaud Boureau, le fondateur de la chaîne Youtube « Carnet de bord – HUMANITAIRE » nous livre son avis d’expert.
Propos recueillis par Adèle Laloux
« C’est en effet un domaine professionnel à part entière qui demande de véritables compétences notamment en termes d’analyse (pour évaluer les risques environnementaux, économiques, sociaux et sécuritaires liés à une crise par exemple et mettre en œuvre des activités qui répondront aux besoins de la manière la plus adéquate possible), en termes de management (ce qui suppose de savoir recruter, former et gérer une équipe) ou de suivi budgétaire (pour veiller chaque jour à la bonne utilisation des fonds attribués aux projets d’assistance).
Il faut en plus de cela développer des qualités relatives à la rédaction (pour les nombreux rapports écrits à réaliser) et à la résistance au stress. Étant donné que l’humanitaire est un domaine où l’on ne compte pas ses heures de travail, l’engagement solidaire est également une qualité importante, puisqu’elle permet de nourrir la motivation. L’ouverture à l’interculturalité est aussi primordiale. Enfin, l’humanitaire est un environnement très normé, c’est pourquoi il faut aussi être apte à respecter les règles imposées en toutes circonstances (principes humanitaires liés à la neutralité/indépendance/impartialité, règles de sécurité et de conduite, etc…). »
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« Si l’on souhaite se lancer dans l’humanitaire, il est tout d’abord essentiel de savoir quel métier on souhaite exercer. Il existe effectivement différents secteurs en son sein – logistique, gestion des ressources humaines, comptabilité/finance, médical, eau et assainissement, ingénierie agricole, etc… – et donc une très grande diversité de métiers. Et pour parvenir à exercer ce métier, il est indispensable de suivre une formation professionnelle adaptée.
Pour ce faire, il est notamment possible de suivre une formation strictement liée à l’humanitaire pour obtenir les compétences nécessaires au montage et à la gestion d’un projet d’assistance par exemple. L’avantage de ces formations généralement universitaires, c’est que beaucoup d’entre elles sont « généralistes ». Elles permettent d’obtenir une très grande culture humanitaire puisqu’elles forment des personnes qui sont plus ou moins en mesure de tout faire sans pour autant être des techniciens dans un domaine spécifique de l’humanitaire.
L’autre possibilité, c’est de se former à un métier technique qui ne s’exerce pas uniquement dans l’humanitaire, comme les professions du secteur médical (infirmier, médecin) ou liées à la logistique, la gestion des ressources humaines et la comptabilité/finance. L’avantage de ce type de parcours, c’est qu’il permet d’alterner plus facilement entre des postes dans l’humanitaire et des postes dans le monde du travail plus traditionnel. En revanche, ce parcours impose d’avoir 2 à 3 ans d’expérience professionnelle pour pouvoir postuler à ce type de poste dans l’humanitaire. »
« J’ai en tête deux idées reçues sur l’humanitaire particulièrement tenaces. D’abord l’idée selon laquelle n’importe qui peut faire de l’humanitaire, dès l’instant que l’on est doté de bonnes intentions. En effet, beaucoup continuent à penser que sous prétexte que tout le monde peut « aider à sa manière » dans la vie de tous les jours, alors tout le monde a également la possibilité de participer à une activité humanitaire. En réalité, ce n’est pas si simple.
Pour expliquer cela, je fais généralement une analogie avec le monde de la restauration. En effet, tout le monde est suffisamment doué ou est en mesure de cuisiner quelque chose chez soi pour ne pas se laisser mourir de faim. Est-ce que pour autant cela suffit pour dire que tout le monde est capable d’ouvrir et de gérer un restaurant ? Bien sûr que non, puisque cela suppose également de respecter des normes, de suivre des critères de qualité, de mettre en place un mode d’organisation spécifique, exactement comme dans le monde humanitaire (en plus des compétences citées dans votre précédente question).
Une autre idée reçue très répandue est celle selon laquelle il suffit d’organiser des collectes (de nourriture, de vêtements, de fournitures scolaires) pour aider les pays les plus pauvres en les distribuant gratuitement sur place. En réalité, ce genre d’initiative est susceptible de faire plus de mal que de bien aux communautés que l’on cherche à aider. En effet, le véritable problème dans les pays en développement est lié à une question d’accessibilité, pas de disponibilité. C’est-à-dire que les produits mentionnés plus haut existent sur place, mais les personnes sont tout simplement trop pauvres pour pouvoir se les procurer.
Par conséquent, si ces produits sont déjà commercialisés sur place, et que quelqu’un ou un groupe de personnes ramène le même type de produits afin qu’ils soient distribués gratuitement, c’est toute l’économie locale qui en pâtira. Certes, les plus pauvres pourront bénéficier des produits qui ont été ramenés de l’étranger grâce à cette distribution gratuite, mais les commerçants locaux, eux, tomberont à leur tour dans la pauvreté, alors que l’idée de base de tout projet de solidarité (dans l’humanitaire d’urgence ou dans les contextes de développement) est de garantir qu’il répond aux besoins exprimés par les populations les plus vulnérables sans développer de nouveaux problèmes. Dans le cadre d’une distribution gratuite, il est donc préférable d’acheter les produits sur place plutôt que de les faire venir de l’étranger. »
Crédit photo : ThitareeSarmkasat – iStock
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19 novembre, 2021 0 Comments 1 category
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