ancé en 2013 au sein de l’INP de Toulouse, le DNO par apprentissage fait un carton. Pour preuve, cette année, pour la première fois, 100% de la promotion (36 étudiants) est en apprentissage. « Les mentalités changent. Les entreprises comprennent tout l’avantage d’avoir des profils qualifiés. Les étudiants apprécient de vivre le terrain », indique Patricia Taillandier, professeur des universités et directrice jusqu’en juin dernier du DNO. C’est elle qui a mis sur pied l’apprentissage. Pas simple. « Au début, les enseignants et étudiants pensaient qu’ils seraient moins bien formés. Et les entreprises considéraient qu’avoir un apprenti c’était une charge », indique-t-elle. Sans compter la logistique à mettre en place : les programmes ont été repensés du fait d’une présence discontinue au sein de l’école.
Le calendrier des études est calqué sur le cycle de production. Les étudiants sont dans les propriétés de septembre à décembre, pour être présents lors des vinifications. Au final 19 semaines de cours en première année et 16 en deuxième année. Chaque étudiant se voit attribuer un tuteur pédagogique, un enseignant du DNO, qui rencontre le maitre d’apprentissage deux fois par an. L’étudiant doit rédiger des rapports semestriels sur les missions qu’il effectue dans l’entreprise.
« Ce sont des salariés en formation et aussi des étudiants comme les autres. C’est un parcours doublement exigeant », précise-t-elle. Au final un tiers des élèves se fait embaucher dans l’entreprise qui les a formés.
Dans le Vaucluse, Frédéric Herrada, responsable formation professionnelle, au lycée Professionnel Agricole et Viticole d’Orange lui aussi observe la montée en puissance de l’apprentissage. « Cette année, nous avons 170 apprentis en viticulture contre 80 il y a cinq ans. Nos effectifs ont doublé », constate-t-il. Sur ces 170 apprentis, 20 sont en CAP, 20 en Bac pro le reste en BTS. Avec un bémol : le BTS commercialisation des vins ne réunit qu’une vingtaine d’apprentis. C’est peu. La raison est simple : les exploitations préfèrent les étudiants en BTS production qui leur paraissent plus polyvalents.
Frédéric Herrada constate que les maitres d’apprentissage se bousculent au portillon. « Nous avons un listing d’un millier d’exploitations viticoles qui seraient prêtes à prendre des apprentis. Mais on n’a pas assez de candidats. L’apprentissage souffre encore de cette image de voie de garage », constate-t-il. Signe encourageant : depuis trois ans, des adultes bien diplômés (Bac +5), en reconversion professionnelle, se tournent vers l’apprentissage et passent un BTS en un an. Ils étaient trois l’an dernier. Ils sont 18 cette année.
A Beaune, le Centre de Formation d’Apprentis Viti Agro Campus, affiche 242 apprentis dont 18 en CAP le restant en Bac pro et BTS. Patrick Mathieu, le directeur de l’établissement est optimiste : « Il y a dix ans on était n’avait que 160 apprentis. La progression est encourageante. La montée en compétence aussi. Les professionnels se tournent de plus en plus vers des BTS. On commence à penser que l’apprentissage est une voie royale ». Et quand Patrick Mathieu imagine une nouvelle formation, répondant aux besoins du secteur, c’est seulement par la voie de l’apprentissage qu’il l’envisage. Avec la Fédération des négociants éleveurs de la grande Bourgogne, il réfléchit à une formation d’assistant secrétaire export. Une offre qui n’existe pas.
En Charente, l’institut de Richemont en partenariat avec Bordeaux Sciences Agro et le lycée de l’Oisellerie près d’Angoulême, peaufine un nouveau diplôme, par la voie de l’apprentissage : un bachelor baptisé « management production et distillation ». Le projet doit aboutir en octobre 2022. « Avec la bonne santé de la filière cognac, les entreprises recherchent des « bras droits » qu’elles ne trouvent pas sur le territoire local. Nous avons voulu répondre à leurs besoins », explique Yannick Laurent, directeur de cet institut qui voit ses effectifs d’apprentis progresser : ces dernières années ils étaient 15 à 20 par classe contre trente aujourd’hui. 10 sont en bac pro, 50 en BTS viti et 22 en BTS commerce vins et spiritueux.
En Gironde, Luc Faure, responsable départemental du recrutement pour le CDFA-CFPPA Bordeaux Gironde, s’occupe de 8 CFA, soit 600 apprentis dont 40% en formations viticoles. Et de dresser un état des lieux : les CAP sont quasi inexistants par manque d’intérêt des jeunes pour ce niveau de formation. Quant au Bac pro, ce sont des promotions de 50. Pas plus. Par contre, le BTS par apprentissage a le vent en poupe, avec 70 élèves chaque année.
Autre constat : il y a plus d’offres de postes d’apprentis de la part des exploitations viticoles que de candidats. Pour Luc Faure, l’explication est simple : « On a encore un gros travail à faire pour redorer le blason de l’apprentissage. On a besoin de têtes d’affiches qui s’engagent pour l’apprentissage, qui donnent envie aux jeunes de choisir cette voie, comme Philippe Etchebest l’a fait pour la restauration ». Bref, faire appel à des ambassadeurs en viticulture qui portent la bonne parole.
Ocapiat l’organisme qui finance les contrats d’apprentissage, observe un bond de 40 % de ces contrats en viticulture cette année. 68 % des entreprises qui ont un apprenti ont moins de 11 salariés, 20% de 11 à 50 salariés et 12% plus de 50 salariés. Les petites entreprises sont les plus sensibles à de l’aide exceptionnelle de l’Etat, notamment pour l’embauche de jeunes en niveau post bacs. Trois régions viticoles caracolent en tête en matière d’embauche d’apprentis : Nouvelle Aquitaine, Bourgogne Franche-Comté et Occitanie. Sur le plan des formations, les BTS représentent 30 % des contrats signés. L’équilibre hommes (55 %) et femmes (45 %) est presque atteint avec une grande majorité d’apprentis de plus de 18 ans.
3 décembre, 2021 0 Comments 1 category
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